Lavage de cerveau




16 février 2006

Tout les y poussait, et en particulier le gouvernement Jospin, qui avait créé pour l’occasion sur Internet un site officiel http://www.droithomme.gouv.fr où l’on pouvait lire : « La mise à disposition des espaces publicitaires est offerte par les afficheurs français ».

Le résultat de cette synergie désintéressée ? Une étonnante campagne métropolitaine illustrant la vocation libératrice de l’humanisme publicitaire, au moyen d’affirmations bien senties qui semblaient tout à fait illustrer la Déclaration universelle. Voici cinq ou six axiomes méritant d’être médités :

- « La liberté d’expression est née sur les murs. » Très juste ! Il est vrai que la propagande aussi s’étale sur les murs. C’est la preuve qu’il y a de la place pour tout le monde.

- « Les afficheurs vous offrent la possibilité de vous exprimer. » Une évidence ! Et même, ils vous l’offrent gratuitement, sans intervention de votre part. Car ils font si bien leurs sondages et études de marché que vos désirs se trouvent déjà exprimés dans leurs affiches, sans que vous ayez à vous donner la peine de prendre la parole. On comprend dès lors que soient poursuivis devant les tribunaux les passants étourdis qui y ajoutent d’inutiles graffitis, ou les « barbouilleurs » d’images qui vandalisent le spectacle de leur propre bonheur...

- « Ca fait cinquante ans qu’elle emm... les dictateurs ». Bravo, la publicité ne mâche pas ses mots ! à noter que les dictateurs, peu vindicatifs, ne manquent pas pour autant de recourir à elle. Toute la question est de savoir si la dictature des publicitaires viendra à bout du libre-arbitre des dictateurs.

- « Depuis un demi-siècle, elle a la haine de l’exclusion. » Et elle l’a prouvé. Elle ne s’est jamais contentée d’appeler à la surconsommation les peuples de pauvres et de chômeurs : elle s’adresse aussi, un peu partout dans le monde, à ces minoritaires que demeurent les plus riches. C’est là ce qu’on peut appeler sa vocation religieuse.

- « Nul ne sera l’objet d’immixtion arbitraire dans sa vie privée. » Il ne manquerait plus que cela ! Tout est question de définition. Si l’on considère que la vie privée est ce lieu précis, à l’intérieur de soi, qui échappe encore au système médiatique, on en déduira sans peine que l’intrusion des publicités dans nos foyers par la télévision, le téléphone ou le courrier, -choses très publiques- ne saurait nullement être taxée d’immixtion. En tout cas, pas d’immixtion arbitraire, puisque la loi l’autorise...

- « Toute personne a droit à l’éducation. » Réfléchissons : éducation = communication. Or, publicité = communication. En conséquence : publicité = éducation. Il est donc scandaleux que les bienfaits du système publicitaire ne soient pas encore au programme de l’éducation civique, en attendant que les cours de nos meilleurs professeurs soient parrainés par les meilleures marques.

Les élèves ont droit à la pub ! Et d’ailleurs, leurs parents aussi.

Mieux : nous avons tous droit à la manipulation. Pour peu qu’elle soit éthique, bien entendu...

Libellés : , , ,

 

 Ajoutez La Grande Manipulation de 1998  : la Déclaration des Droits de l’homme publicitaire à vos Favoris Mis en lumière par George Orwell @ Chercheur Virtuel à 05:27 |